A une époque, à la table familiale, nous avions des garçons monopolisant la conversation, faisant le show à chaque repas, et des filles, béates et silencieuses devant eux. La situation me semblait problématique, en particulier pour la petite dernière qui n’arrivait pas à en placer une. J’ai donc mis en place une tradition ancestrale et tribale et le miracle a eu lieu. La petite a enfin pu dire ce qu’elle souhaitait sans être interrompue.
Comment ? En mettant en place l’utilisation du bâton de parole.
Avec celui-ci dans les mains, bizarrement, les garçons devenaient timides et presque taiseux, ils avaient nettement moins envie de se donner en spectacle, c’était amusant. Je vous épargne les analyses énergético-psycho-psychanalytiques qu’on pourrait en déduire. Par contre, ils pouvaient enfin prendre le temps d’écouter ce que les filles avaient à exprimer et surtout, les filles n’avaient plus envie, par moment, de leur mettre un vrai coup de bâton. Les repas ont alors pris une tournure beaucoup plus intéressante et avantageuse pour tous.

D’où vient cette tradition ?

Le bâton de parole a des origines amérindiennes et africaines, c’est un outil servant à réguler la parole au sein des groupes.
Lors des assemblées, il est passé d’un des membres à un autre et seul celui qui a le bâton a droit à la parole. Ceci assure que tous les membres soient entendus, et notamment ceux qui peuvent craindre de s’imposer.
Le conseil peut, de façon consensuelle, décider de faire passer le bâton à un autre membre pour éviter que le débat ne soit dominé par les plus prolixes.
Il est même possible de faire représenter, dans le cercle de parole, les animaux, le futur, la nature pour que toute décision prise par les membres soit juste pour les humains mais aussi pour la terre en général. C’est un autre sujet.

Comment l’utiliser ?

Celui qui prend le bâton a quelque chose à dire et demande l’écoute, l’attention et le respect de tous. Il ne sera pas interrompu, il pourra s’exprimer à son rythme. Le bâton en main, il ne sera plus question de parler sur l’autre mais au contraire de revenir à soi et d’exprimer, dans le registre du témoignage, une idée, un ressenti, un fait, un sentiment, une croyance…
Il s’agit de développer une capacité d’écoute véritable et d’inciter chacun à construire sa réflexion et son argumentaire. La parole devient un acte assumé qui permet de nourrir l’expression par l’écoute et inversement. Le bâton de parole est un symbole fort qui responsabilise l’individu.
On peut utiliser un sablier si l’on veut que le temps de parole soit égal entre les participants à la discussion. Nous n’en avons jamais eu besoin en famille, une fois l’argumentation déroulée, la prise de parole s’arrêtait naturellement. C’est peut-être nécessaire en entreprise par contre.

La réunion en cercle

En entreprise, en groupe ou en famille, il est possible de choisir une fréquence et un jour précis, afin de créer un rituel, le mieux est aussi de constituer un cercle avec des chaises. Celui-ci favorise le respect mutuel, l’écoute, la fluidité dans l’échange, et la prise en compte de tous. Les parents ou les organisateurs se positionnent dans le cercle, au même niveau que tous les autres, il n’y a pas de position dominante. Ils peuvent juste faciliter l’organisation.

« En tant que figure géométrique, le cercle a toujours eu un sens magique et, lorsque des personnes s’assoient en cercle, on y trouve une magie sociale. Les gens se sentent, physiquement, partie d’un ensemble ; ils se sentent plus proches et plus unis les uns des autres. » H. Bessell

Les règles de la réunion avec bâton de parole

  • Tout le monde a le droit de s’exprimer.
  • Aucune obligation de s’exprimer.
  • On lève la main pour demander la parole.
  • Seul celui qui a le bâton en main peut s’exprimer.
  • On est respectueux de la parole d’autrui, même si l’on n’est pas de son avis.
  • On parle de soi avec honnêteté.
  • On prend la parole assez brièvement afin que chacun ait l’opportunité de parler.
  • On s’exprime respectueusement, sans moqueries ni insultes
  • On transmet le bâton doucement et en silence quand on a fini

Un exercice d’écoute active

L’outil permet de se rapprocher de l’écoute active prônée par Thomas Gordon. Je vous propose cet autre exercice : 2 par 2, chaque personne parle à un partenaire pendant 3 minutes. Pendant ce temps, la personne qui écoute ne pose pas de question et n’interrompt pas la personne qui parle. Écouter, faire l’expérience de parler en étant écouté, ainsi que d’écouter réellement. C’est un cadeau que vous vous faites mutuellement.
Cet exercice est à la portée de tous.

Ce WE, et si vous partiez dans les bois à la recherche du bâton de parole idéal ?

 

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Marie Bertolotti